venerdì 18 dicembre 2009

Un joli texte sur "Nuances mémorielles du totalitarisme"


En consultant un site (www.lesouffleur.net) j'ai remarqué un excellent texte écrit par une redactrice du site, Maeva Rinkel..

Encore sous le charme de cette plume, le voilà !

"Vie et Destin de Vassili Grossman est un roman fleuve et polyphonique dont l’ambition affichée était d’être le guerre et paix du XXème siècle.
Le fil rouge de l’histoire, le destin tragique de deux sœurs Chapochnikova, est cousu sur la bataille de Stalingrad de 1942.
Lev Dodine s’empare de cela et façonne en un peu plus de trois heures, une véritable allégorie de la peur.
L’im-passe
Au départ , il est question d’un jeu de ballon.

Nous sommes en 1942, la bataille de Stalingrad ne tardera pas à battre de son plein, il sera question de goulags, de camps, de ghettos, de morts froids, d’obus chauds. Mais au départ, c’est un simple volley.
La balle frôle chacun des acteurs, elle glisse entre les deux camps, elle vole et semble légère bien qu’elle soit celle qui accapare tous les personnages.
Cette balle, on aurait également pu l’appeler Peur. La peur qui hantera tous les instants de la pièce qui s’apprête à se dérouler. Une peur d’autant plus forte que les acteurs ne hurlent jamais son nom. Une peur en filigrane de chacune de leurs assertions, de chacun de leurs mouvements - de chacun de nos propres affects face à la puissance du texte.
Une vraie vie affirmée.
Or, il ne saurait être question d’allégorie de la peur que dans une pièce qui vit pleinement.
Et celle-ci, oh, regorge d’énergie.

Lev Dodine par l’usage atypique qu’il fait de la scène (renfermant cinq lieux qui dans l’esprit du spectateur dont clairement distincts bien qu’ils soient concrètement mêlés) renouvelle le ton de la pièce tous les quarts d’heures.
Les trois heures glissent dès lors à l’image de la neige mise en scène, fugaces à tomber, pérennes à hanter.
De surcroit, l’usage de la langue russe renforce le sentiment de vrai que les acteurs, par une parfaite maîtrise de leurs jeux, suscitaient déjà.
...et doucement nuancée
Mais s’il est question d’une illusion de vrai, il n’est en revanche jamais question de vérité assénée. Nul dogmatisme ; la pièce donne juste à songer aux jougs du nazisme et du stalinisme. Tout Vie et Destin est affaire de nuance.
D’une scène, la lumière vive et les quelques notes de musique viennent chasser un précédent ton pathétique ; quelques rimes chaudes ponctuent l’effroi, quelques danses légères se glissent dans l’intensité des combats.
L’usage de la musique pour renforcer le tragique.
Par brefs instants, des notes de piano ou quelques contre-chants se font entendre.
Comme de jolies gouttes d’art et d’humanité au milieu des logiques totalitaires subies par les protagonistes.
Et la fine bruine de se transformer en un véritable raz-de-marée quand la scène finale nous est donnée à voir.
Les instruments comme seuls vêtements, les prisonniers des camps sont, métaphoriquement (et pas que) dévêtus de toute dignité.
Alors, dans nos ventres, le malaise qui gonflait ne peut qu’éclater. Et nos mains, de battre le génie de Dodine, ne parviendront plus à s’arrêter. "
Photo : Anton Alain
Auteur : Maeva Rinkel

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